8- Persan, farsi ou dari ; elle est la plus vieille des langues modernes | Quatre renaissances iraniennes | RoohSavar
Elle est à la fois la plus vieille des langues jeunes et la plus jeune des vielles langues. Quelle est son histoire ? Ses origines ? Il faut dire le persan, le farsi ou le dari ? Bonne lecture !
La langue persane appartient à la branche indo-iranienne de la famille des langues indo-européennes. Cette langue est issue du moyen-persan (ou pahlavi), elle-même issue du vieux-perse. Ces deux langues sont originaires de l'ancienne région de Pars (les provinces de Fars et Bushehr situées dans le sud de l'Iran et le sud de l'actuelle Yazd au centre).
Plus précisément, voici le chemin généalogique : langues indo-européennes => langues indo-iraniennes => langues iraniennes => langues iraniennes occidentales => langues iraniennes du Sud-Ouest => vieux perse => moyen perse => persan moderne.
Le vieux-persan antique était la langue officielle de l'empire achéménide et son descendant, le moyen-persan, était la langue officielle et religieuse de l'empire sassanide. Un dialecte du persan moderne, nommé persan « dari », est devenu le dialecte écrit standard dans la région du Khorasan, dans l’Iran oriental (aujourd’hui situé entre l’est de l’Iran et l’ouest de l’Afghanistan), puis dans tout le territoire iranien et enfin dans le monde entier.
Le secret de la longévité de cette très vieille langue demeure dans
sa transformation anticipée. L’apparition du persan moderne coïncide avec l’effondrement des anciens empires de l’Antiquité durant le XIIe et le XIIIe siècles et l’émergence d’un nouveau monde.
Elle est à la fois la plus vieille des langues jeunes et la plus jeune des vielles langues. La parution du persan moderne a un siècle d'avance sur le latin et douze siècles sur l'anglais.
Elle est l'une des langues les plus riches et les plus vastes du monde en termes de gamme et de variété de mots. Le persan moderne a su garder son attractivité depuis douze siècles. Un dictionnaire persan, le plus important jamais rédigé du nom de Dehkhodâ, en 15 Volumes est paru en 1931. Ce travail d’étude linguistique a été observé dans peu de langues.
Les persanophones d’aujourd’hui ont le bonheur d’être capable de lire les poèmes écrits il y a mille ans de Ferdowsi décédé en 1020 par exemple, les comprendre sans le moindre d’effort et les employer dans leur vie quotidienne. Cela est, en effet, une pratique courante chez les persanophones. L'attrait des persanophones pour la poésie n'est plus à démontrer, elle fait partie de leur vie quotidienne. Tous connaissent par cœur les vers des plus grands poètes persans, tous ont chez eux un recueil de poèmes. C'est une manière d'embrasser leur culture.
Selon les estimations, aujourd’hui, plus de 70 millions de personnes en Iran, 25 millions en Afghanistan, 9 millions au Tadjikistan et entre 10 et 12 millions en Ouzbékistan parlent le persan. Le persan a également des dialectes natifs au Bahreïn, en Irak, au Pakistan, au Koweït, aux Émirats arabes unis, au Qatar, en Russie, en Azerbaïdjan, au Kirghizstan, au Kazakhstan, au Turkménistan, en Chine et en Inde. Compte tenu du statut officiel du persan en Iran, en Afghanistan et au Tadjikistan et de la prédominance des locuteurs d'autres langues comme deuxième langue, le nombre total de locuteurs du persan dans le monde peut être estimé à 120 millions ou selon certaines estimations jusqu’à 200 millions.
Le persan n’appartient pas du passé. Elle est une langue vivante, la cinquième langue la plus utilisée sur internet, avec 3,3 % du contenu mondial, alors qu'il ne figure même pas parmi les dix premières langues des internautes. Seuls 0,7% des utilisateurs sont persanophones. En termes de quantité, il existe plus de contenu persan qu’en français ou en allemand, et autant que de contenu chinois, espagnol et portugais tous réunis. Cela montre que les persanophones sont en surproduction de contenus et de savoirs sur la toile.
Le persan et la famille des langues iraniennes
Les ethnologues estiment le nombre de langues iraniennes à 85, parmi lesquelles le persan en Iran, en Afghanistan, au Tadjikistan et au Daghestan (sous le nom de tati), le pachto en Afghanistan et le kurde en Irak qui ont un statut officiel.
Comme on l’a vu plus haut, les langues iraniennes sont généralement divisées en trois périodes : antique, moyenne et moderne. Ces périodes correspondent aux périodes de l'histoire de l'Iran (connu sous le nom de la Perse en Occident). Ainsi, la période de l’Antiquité (550 av. J.-C. - 330 av. J.-C) est liée à l'époque de l'empire achéménide jusqu’à la chute des Parthes (en 224), la période moyenne est liée à l'époque de l'empire sassanide qui succède à celle des Parthes, et la période moderne est liée à l'époque de l'arrivée de l'islam en Iran vers (en 651) jusqu'à aujourd'hui.
Parmi de nombreuses langues iraniennes, le persan moderne est la seule qui entretient des relations linguistiques étroites entre ces trois périodes de l’histoire, et de la même manière, le vieux-persan, moyen (pahlavi) et moderne (dari) constituent tous la même langue, qui est le persan ; Cela signifie, comme on a vu auparavant, que le nouveau persan est un descendant direct du vieux-perse et du moyen persan ; Alors qu'il est difficile d'établir des relations de parenté directe entre les autres langues iraniennes des époques médiévale et moderne.
Les langues du nord-ouest de l'Iran englobent le kurde, le mazandarani, le guilaki, le talysh, le tati, le zazaki, le gurani, le balochi et les dialectes du centre de l'Iran. Les autres sous-groupes de langues iraniennes, les langues iraniennes orientales, comprennent l’ossète, le pachto et les langues palmyriennes. Le persan est la langue iranienne la plus parlée, suivie du pachto (en Afghanistan et au Pakistan), du kurde (en Iran, en Turquie et en Irak) et du baloutchi (en Iran, au Pakistan mais aussi en Afghanistan).
Le « persan » ou le « farsi » ?
Cette langue est connue linguistiquement sous le nom de « pârsï », officiellement de « fârsï » en Iran, et de « darï » en Afghanistan, et de « tâdjik » au Tadjikistan et en Ouzbékistan. Au Bahreïn et dans d'autres pays du golfe Persique, cette langue est également appelée « ’adjami » et aussi farsi.
Étymologiquement, le mot « fârsï » est l'arabisation du mot « pârsï », qui résulte de l'absence de la lettre "P" dans le système phonologique arabe remplacé normalement par F ou B. (exemple : en arabe, Palestine devient Felestine ou Paris devient Baris). Bien qu’il soit devenu courant depuis peu de dire « farsi » à la place de « persan », il est plutôt correct de dire « persan » quand on parle et on écrit en français. La raison est simple : de la même façon qu’en français on ne dit pas « je parle english » mais « je parle anglais » on doit dire « je parle persan » et non pas « je parle farsi ». Sinon on pourrait imaginer qu’il s’agit d’une langue différente de ce dont parle Montesquieu dans ses « Lettres persanes » ou celle qu’Albert Camus évoque dans son roman « La chute ». Bien que les Iraniens disent « Fârsi » quand ils parlent de leur langue (avec un â qu’on étire longuement et qui se rapproche presque d’un O mais aussi un R qu’on roule doucement à l’anglaise mais pas à l’espagnol), nous en français devons prendre soin de dire « le persan » et pas « le farçï !».